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13 septembre 2013 5 13 /09 /septembre /2013 12:55

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Il avait répondu positivement à l’invitation de ses deux filles, Serpina et Euridice, de vraies jumelles, dont la mère avait quitté paisiblement la petite planète bleue, souriant à une autre vie, dans un autre monde, sans chimiothérapie, ni perruque.

 

Devenu veuf et presque en même temps retraité, Orfeo di Donato avait perdu le goût des longues promenades, que ce soit en ville ou à la campagne. Il s’abandonnait à la mélancolie, laissant sa bibliothèque s’empoussiérer et repassant sans cesse les lamentations d’Orphée dans l’opéra de Gluck. Sa petite moustache noire devenait une broussaille poivre et sel, ses cheveux dégringolaient sur le col des chemises et ses ongles endeuillés s’accrochaient à son pull distendu.

 

Ce jour-là, en début d’après-midi, alors que du balcon de son appartement,  son regard vague effleurait le beau marronnier de l’école désertée, les herbes folles de jardins abandonnés et la gracieuse silhouette du clocher paroissial, son portable vibra puis sonna. Orfeo sursauta. C’était si rare qu’on l’appelât. Il se précipita, envoya son téléphone valdinguer et le rattrapa in extremis, pour décrocher.

 

-      Allô, papa !

 

C’était ses filles. A leurs arguments, aussi tendres qu’impérieux, il ne résista pas.

C’est ainsi que le 31 août, peu avant midi, il débarqua à la gare de Namur et se rendit au lieu de rendez-vous : « La blanche maison », place Saint-Aubain. Il pleuvait doucement et au-delà de la Sambre, sur son orgueilleux sommet, la Citadelle s’embrumait.

 

       Dans la cohue provoquée par le marché, Orfeo se faufila, anxieux. Avait-il bien mémorisé l’itinéraire à suivre ? Arriverait-il à temps ? Son aspect était-il convenable ? Il s’arrêta un instant devant la vitrine d’une boutique, se redressa en rentrant un soupçon de bedon, s’examina de la tête aux pieds et se gratifia d’un demi-sourire satisfait. Cheveux coupés, moustache taillée, il estima qu’il avait encore belle allure dans son complet beige, fait sur mesure, et sa chemise blanche à col ouvert. Elégance surannée : ses filles ne manqueraient pas de le lui faire remarquer. Mais il s’en fichait un peu. C’était la tenue préférée de son épouse et, désormais, il ne devait plus se soucier de plaire.

 

       Dans sa précipitation, Orfeo déboucha sur la place Saint-Aubain, dépassant ainsi l’endroit convenu. Il s’en rendit compte et fit demi-tour. Serpina ? Oui, c’était bien Serpina, qui venait à sa rencontre et le hélait.

 

-      Papa, nous sommes là. Nous t’avions bien dit : en face de la librairie.

 

Orfeo accepta la remontrance avec bonhomie. Serpina se pencha pour l’embrasser

sur le front. Et oui, elles étaient grandes ses filles. Grandes et sveltes, aussi blondes que des elfes nordiques, alors que lui avait eu le plumage d’un corbeau et la taille d’un boxeur poids plume. A vrai dire, elles avaient tout pris de leur mère et si peu de lui.

 

       De l’autre côté de la rue, à l’abri d’un parasol rafraîchi par la pluie, Euridice les attendait. Elle achevait d’épingler son chignon, puis renouait autour du cou, un foulard de gaze légère, voilant son décolleté. (Son père n’aimait pas trop les nudités, surtout chez ses filles). Euridice se releva et s’inclina pour poser un baiser sur chaque joue d’Orfeo.

 

-      Bravo, dit-elle, tu es parfaitement rasé !

Ravi du compliment, Orfeo s’assit, souriant et découvrant des dents presque blanches.

Serpina et Euridice, l’une près de l’autre, lui faisaient face. Orfeo eut pour elles le regard de Dieu le Père, contemplant sa création.

Elles avaient été de jolies filles et étaient devenues de très belles femmes, non seulement à ses yeux, mais à ceux de nombreux mâles qui les dévisageaient effrontément.

Cela exaspérait Orfeo, non qu’il éprouvât une sorte de jalousie, mais bien parce que, en dépit ou à cause de leur éclat, elles ne trouvaient pas de mari. Ça, il ne le comprenait pas. Il s’en était ouvert lors de leur 35ème anniversaire, quelques semaines auparavant et elles avaient répondu :

-      On est si bien célibataires.

Il avait bafouillé :

-      Oui, mais…

Et devinant sa pensée, elles avaient enchaîné, en s’esclaffant :

-      T’inquiète pas papa, on peut faire des enfants sans être mariées et même sans hommes.

Cette perspective l’horrifiait, mais il n’en avait rien laissé paraître, se lamentant intérieurement.

 Aujourd’hui, en cette matinée incertaine, alors que le soleil tentait de chasser les nuages, il se souvenait de ces paroles, comme d’une meurtrissure. Une fois de plus, il décida de se taire. Interrogeant le ciel et ses filles, il demanda :

-      Je parie sur le soleil, qu’allons-nous faire ?

Un moment d’hésitation, un débat qui s’amorçait. Il fut interrompu par l’intervention du jeune serveur.

-      Pour vous M’sieur, Dames ?

 

Le trio désaltéré décolla une demi-heure plus tard, se dirigeant vers la Sambre, réconcilié avec le ciel, dont la mauvaise humeur n’avait été que passagère.

Empruntant le chemin de halage, Serpina ouvrait la marche, suivie par sa sœur et son père se tenant par le bras. Cette avance que prenait Serpina sur Euridice, était une habitude acquise depuis la naissance. L’une avait poussé son premier cri trente minutes avant l’autre, un soir un peu avant minuit, quand la roue zodiacale basculait d’un signe vers le suivant. Les astrologues y voyaient, à coup sûr, la seule raison expliquant que des jumelles aussi ressemblantes diffèrent tant par le caractère. Le seul fait avéré c’est que Serpina revendiquait son droit d’aînesse et qu’Euridice y trouvait quelque confort.

 

       Quelques centaines de mètres plus loin, Orfeo marqua un temps d’arrêt à l’embarcadère des « Namourettes ». Il trouva le mot joli et exprima le souhait d’une excursion au fil de l’eau.

-      Plus tard, suggéra Euridice, constatant que sa sœur tournait en rond, à hauteur d’un arc, certes élégant, mais qui n’avait rien de triomphal.

Entre-temps, Serpina s’était assise sur la première marche menant à la Maison de la Culture, exposant ses jolies gambettes hâlées. Orfeo pensa :

 

-      Elle s’habille comme une gamine de seize ans, sa jupe est trop courte.

 

Il avait envie de semoncer, mais il s’abstînt, ne sachant trop s’il méritait d’être traité de « vieux jeu » ou de « lâche ». Il serra les lèvres, puis, résigné, décocha son plus aimable sourire :

 

-      Nous voici ! Es-tu pressée ?

-      Mon estomac crie famine, répondit Serpina, en se redressant.

 

Ils emboîtèrent le pas à l’affamée et débouchèrent sur la place d’Armes, déguisée en estrade géante, inondée de soleil, parcourue de petits groupes épars. Un attroupement plus nombreux attira leurs regards, ils s’en approchèrent.

 

Un homme de belle apparence, en tenue sombre, chemise blanche et cravate grise ornée de grands losanges, faisait face à un public essentiellement féminin. Il tenait en main un livre de poche, qu’il ouvrit à la page marquée d’un signet orange.

Discret raclement de gorge. Il se mit à lire : voix posée et agréable.

 

 Le récit évoquait une des multiples aventures d’un imam facétieux, ayant vécu en Turquie, au 17ème siècle. Nas Reddine Hodja avait vocation à l’immortalité et pourtant, un jour de marché où le pieux homme se rendait, en chevauchant bizarrement son âne, quelqu’un lui fit la prédiction suivante : si ta monture pète trois fois, tu mourras.

 

Le lecteur et les auditeurs souriaient d’avance, imaginant l’âne impassible et Nas Reddine secoué par chaque détonation annonçant l’imminence de son trépas.

Le piquant de la situation tenait aussi à la qualité du lecteur, manifestement un notable de la ville, auquel Serpina et Euridice attribuèrent du talent et beaucoup de charme. Elles applaudirent la conclusion et entraînèrent leur père vers la place de l’Ange. L’être céleste semblait désemparé de se retrouver dans une telle cohue humaine. Il embouchait une trompette thébaine, brillant d’un éclat renouvelé et semblait sonner le rappel de ses congénères, planqués au paradis.  

 

       Le trio orphique ne s’attarda pas en ce lieu et gagna immédiatement une autre place, plus exiguë, dominée par une belle église au style incertain, avec des réminiscences gothiques et un clocher plutôt baroque. Il y régnait une atmosphère de grande fête de famille ; les badauds sereins et nonchalants s’y pressaient en grand nombre, envahissant les terrasses éparpillées à l’ombre des tilleuls et des parasols. En son périmètre s’étalaient des façades somptueuses ou rustiques, en tout cas vénérables, d’établissements dédiés aux plaisirs de la table. Jeunes et vieux s’y côtoyaient, la mine réjouie.

Serpina, en avant-garde, avait dégoté trois places dans un restaurant italien. Elle agitait les bras comme des sémaphores et sa bouche articulait des mots inaudibles à l’adresse de ses père et sœur. Le message franchit cependant la barrière du brouhaha. Orfeo, suivi de la « cadette », força le pas.

Le trio s’installa entre deux couples débonnaires et apprécia qu’un garçon s’enquérît aussitôt de leurs désirs.

 

       A l’apéritif, Euridice s’étonna que la ville, réputée si paisible, fût envahie par tant de monde. Le soleil, le marché, la fin des vacances semblaient fournir de bonnes raisons.

 

-      Il y a plus, intervint un des voisins de table.

-      Ah ! Quoi donc ?

 

L’interrogation provenait de Serpina. Elle fut reprise par Orfeo et Euridice.

Le monsieur, qui avait suscité l’intérêt, se rengorgea et prit un air assez docte, de professeur émérite. (Il ne l’était pas, mais chercheur au CNRS, section littérature française du 19ème siècle). Il expliqua :

 

-      Ce week-end, Namur accueille, en son théâtre, l’Intime festival et dans ses rues les propagateurs de la joie de lire. Regardez…

 

Il désigna trois dames de blanc vêtues. L’une était blonde coiffée d’un béret écarlate, la deuxième ressemblait au chaperon rouge et la troisième agitait des pendants d’oreille couleur sang. Elles étaient des plus charmantes et portaient chacune un panier en raphia.

 

-      Celle-là, je la reconnais, dit Orfeo.

-      Qui ça ? fit Serpina.

-      La plus petite, avec ses cheveux courts. Elle ressemble à Jean Seberg.

-      Quand et où l’as-tu vue ? ajouta Euridice, intriguée.

-      Mais tout à l’heure sur cette grande place, quand « le bel homme » lisait cette histoire de pets d’âne et d’imam.

-      Vous avez assisté au lancement de l’opération « Lire la rue », indiqua  la deuxième voisine.

 

Orfeo se fit expliquer tous les détails par l’interlocutrice, qui se présenta comme conteuse, originaire de Spontin, précisant qu’elle aurait dû  être « liseuse », si son pied ne l’avait pas trahie.

 

-      C’est une excellente idée, conclut Orfeo, tout en guettant tristement les silhouettes blanches qui se perdaient dans la foule.

 

Une conversation animée se noua entre les deux couples et le trio. Orfeo

n’abandonnait pas sa langue au chat, son tonus et sa faconde originels s’affirmaient de minute en minute, ce qui réjouissait sa progéniture, craignant les effets combinés et désastreux de la retraite et du veuvage.

Le compagnon discret de la conteuse signala le retour de « Jean Seberg » et le chercheur l’interpella :

 

-      Venez nous lire quelque chose.

 

Prétextant d’une ouïe déclinante, il l’invita à s’asseoir entre lui-même et Orfeo. Ce qu’elle fit sans rechigner, interrogeant son auditoire sur ses préférences :

 

-      Triste ou gai ? Sérieux ou déjanté ?

 

On voulait un peu de tout, à l’exception de la tristesse. Elle proposa des textes souriants, des contes philosophiques ne se prenant pas au sérieux. Le livre, dont elle cacha la couverture, n’était pas bien épais. C’était de bon augure, les philosophes, tout comme les théologiens, ayant tendance à s’épancher sur des milliers de pages.

Elle prit le livre, l’ouvrit et jeta un regard circulaire. Chacun se cala au fond de son siège, attentif et désireux d’une agréable surprise.

La « liseuse » adoptait le ton de la confidence, elle sussurait. Orfeo ferma les yeux, séduit par la voix de la jeune femme et la mélodie des mots. Avaient-ils du sens, ces mots ? Peu lui importait à Orfeo. Mais la musique ! Et de temps en temps, ce regard sombre qui se posait sur lui. Et cette bouche délicieuse, prometteuse, délicatement chantournée, qui prononçait la meilleure parole. Celle dont le sens est caché derrière les termes les plus insipides ou les plus savants, celles qui rapproche et damne les amants.

 

       Les « écoutants » applaudirent cette première lecture et Orfeo supplia que « Jean Seberg » en fît une autre. La « liseuse » prit une bouteille dans son panier, but une gorgée et fit la grimace. L’eau était chaude.

 

-      Prenez un verre de vin, suggéra le chercheur.

-      Cela vous fera le plus grand bien, surenchérit le compagnon de la conteuse.

-      Et vous nous gratifierez d’un nouveau texte, ajouta Orfeo.

 

(Sourire narquois de Serpina et d’Euridice, qui assistaient à la renaissance inattendue de leur père).

 

Ce fut dit, ce fut fait. Et même au-delà des attentes. « Jean Seberg » égrena quatre ou cinq textes ravissants, avant de disparaître. Elle avait avant de partir, subrepticement, caressé la main d’Orfeo et déposé un baiser à la lisière de sa moustache. Il en demeura pantois.

 

Les compagnons occasionnels se quittèrent. Chacun rentra chez soi.

Le lendemain, Orfeo retourna à Namur. Il patrouilla dans toute la ville, vit d’autres « liseurs » et « liseuses ». Il ne rencontra pas « Jean Seberg ». Il ne connaissait pas son vrai nom, mais il savait la nature de ses propres sentiments et devinait les siens.

 

Michel Sautois  

 

 

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9 septembre 2013 1 09 /09 /septembre /2013 12:12

 

 

Plusieurs dizaines de bénévoles ont lu à voix haute des centaines de textes à des milliers de passants et promeneurs dans les rues de Namur ces samedi 31 août et dimanche 1er septembre.

 

Cette manifestation baptisée « Lire La Rue » avait pour but de promouvoir le plaisir de lire, surtout auprès de ceux qui ne lisent pas ou lisent peu. Les liseurs, habillés de clair ont déambulé dans les rues et sur les places publiques, porteurs d’un panier garni de livres, et offert pendant quatre heures des moments de lecture aux piétons. Ils furent très bien accueillis par le public avec lequel ils ont partagé des moments d’émotion, de rires et d’émerveillement.

De nombreux jeunes se sont montré intéressés et beaucoup d’enfants en redemandaient.

 

Pour les organisateurs de cette manifestation, la bibliothèque communale de Namur et la fondation Lire Le Monde, l’opération a été une réussite au-delà de toute espérance.

Elle sera rééditée en 2014 et étendue à d’autres villes.

 

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3 août 2013 6 03 /08 /août /2013 15:56

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Une question de jours de Sabine Normand, un court texte inspiré par l'histoire de la jeune pakistanaise Malala Yousafzai.

Percutante, cette nouvelle offre un éclairage particulier sur l'histoire de cette petite fille devenue le symbole de la lutte pour l'éducation après avoir été victime d'un attentat des Talibans. Le 12 juillet 2013, Malala Yousafzai a donné un vibrant discours à la tribune de l'ONU. Elle y déclare entre autres que « Les extrémistes ont peur des livres et des stylos. Le pouvoir de l'éducation les effraie. »  

Comme d'autres textes régulièrement mis en ligne, découvrez Une question de jours en accès libre sur le site internet. #ONLITREVUE

http://www.onlit.net/index.php?option=com_k2&view=item&id=746:une-question-de-jours

 

 

 


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11 mai 2013 6 11 /05 /mai /2013 19:48

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A l'occasion du festival des arts de la rue "Namur en mai", quatre acteurs de la compagnie Hypothésarts ont parcouru les rues de la ville en lisant des textes de Borges au public. Photos.DSCF2372.JPG
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23 janvier 2013 3 23 /01 /janvier /2013 18:49

 

APPEL

 

 

 

 

Le samedi 31 août et le dimanche 1er septembre 2013, les rues, les places et les autres lieux publics de Namur seront envahis de « liseurs » qui liront à haute et parfois très haute voix, des extraits de livres, des nouvelles, des petits contes, des scènes de pièces de théâtre et de la poésie en tenant bien les livres devant eux. Cet événement, Livresse de Namur, organisé par la bibliothèque de Namur est la première des opérations destinées à être développées tout au long de l’année par la fondation d’utilité publique Lire Le Monde dont le but est de promouvoir l’accès à la lecture plaisir pour tous.

 

Il s’agit de mettre la lecture en valeur. Sachant qu’en Wallonie et à Bruxelles un habitant sur deux ne lit jamais pour le plaisir, que le nombre d’usagers des bibliothèques publiques n’atteint pas un cinquième de la population, que la promotion du livre ne se fait en Belgique francophone que pendant deux mois par an, et pour ceux qui lisent déjà, il s’agit de faire découvrir le plaisir de la lecture à ceux qui en sont privés, quelles qu’en soient les raisons.

 

La bibliothèque et les libraires de Namur sortiront leurs livres à cette occasion et en inonderont les espaces publics.

 

Nous cherchons des lecteurs pour sélectionner les textes qui seront lus à cette occasion et des liseurs pour lire ces textes en public pendant ces deux journées, les lecteurs pouvant se proposer d’être liseurs et inversement.

 

 

Contacts :

 

081 308 709

0486 02 14 38

gerardselys@yahoo.fr

 

La bibliothèque de Namur

081 24 27 08

bibliothèques.namur@ville.namur.be 

 

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9 juillet 2012 1 09 /07 /juillet /2012 14:41

lectrice2Fondation d’utilité publique

Lire Le Monde

 

La moitié des Francophones de Belgique ne lit jamais pour le plaisir. A l’exception de ce que font remarquablement les bibliothèques publiques sur le terrain local, la promotion de la lecture en communauté française ne couvre au mieux que deux mois par an. La promotion de la lecture doit être permanente.

 

La fondation d'utilité publique Lire le Monde a pour but de promouvoir l'accès à la lecture.

Elle ne s'occupe donc ni de l'analphabétisme ni de l'illettrisme. Partant du  constat que plus de la moitié de la population francophone, en Belgique n'achète pas de livre et, depuis l'école, n'a aucune pratique de la lecture-plaisir, la fondation veut, à l'instar de ce qui se fait en Grande-Bretagne, développer pendant toute l’année l'intérêt pour la lecture au sein des publics qui en sont dépourvus, quelles qu’en soient les raisons. Elle veut donc "fédérer", organiser, mettre ensemble autour d'une vaste opération de promotion de la lecture, tous ceux qui, de près ou de loin, ont quelque chose à voir avec la lecture: bibliothèques, libraires, théâtres, écoles, centres culturels, organisations associatives et pouvoirs publics. Son projet d'un Lirathon (à la manière du Readathon britannique, existant depuis les années quatre-vingt) clôturant le 23 avril 2012 huit mois de sensibilisation intense dans tous les espaces publics et/ou privés possibles a déjà retenu l'attention de la Communauté française. L'originalité de cette opération est qu'elle ne fait pas appel aux subventions publiques déjà trop réduites mais, au contraire, vise à récolter des fonds pour satisfaire les besoins non assouvis de tous les opérateurs susmentionnés.

 

Le programme de la Fondation Lire Le Monde vise, entre autres, à créer des ponts et des liens entre les divers événements organisés en Belgique actuellement autour du livre : Fureur de lire (octobre), Salon du livre de jeunesse (octobre), Tournai la page (novembre), Foire du Livre (mars), Je lis dans ma commune (avril), et, surtout, à combler les vides entre ces événements. Il s’agit aussi de mettre mieux en lumière les manifestations et événements organisés par les acteurs de terrain : bibliothèques publiques, écoles d’alphabétisation, Lire et écrire, troupes théâtrales, conteurs etc…La Fondation Lire le monde recense  encore les « bonnes pratiques » développées à l’étranger (France, Québec, Suisse mais aussi dans les pays anglophones ou autres) de manière à les faire connaître en Belgique.

 

« Lire pour le plaisir s’est révélé être le moteur le plus important des chances futures d’un enfant. »

« Les recherches montrent avec une flagrante évidence que la littérature a un rapport important avec le bonheur et le succès d’un individu. »

« Lire pour le plaisir a plus d’importance pour l’éducation d’un enfant que le statut socio-économique de sa famille. »

National British Literacy Trust

 

 

 

Fondation d’utilité publique Lire Le Monde

Numéro d’entreprise : 0 823 642 143

165 rue Mazy, 5100 Namur, Belgique

             00 32 81 308 709 / +486 02 14  38

                fondationlirelemonde@gmail.com 

 

                   Contacts : Gérard de Sélys et Marie Anne Leszczynska   

 

   Lire

 

Lire [lir] v. tr. – fin XIe ; lat : legere

Suivre des yeux en identifiant (des caractères, une écriture)[1]. Issus du bas latin legere « ramasser, cueillir », « rassembler, recueillir, choisir .»[2]

 

« Depuis l’invention de l’écriture, il y a quelque six mille ans, nous pouvons recevoir les idées émises il y a de nombreux siècles. Par l’écriture, les expériences individuelles sont délocalisées dans la durée, mises hors d’atteinte de l’oubli, à la disposition de ceux qui plus tard les liront. La pensée du lecteur peut côtoyer la pensée de l’auteur et en être enrichie ; le décalage du temps est annulé. Mettre cette performance, sans doute la plus décisive de celles que l’humanité s’est octroyée à elle-même, à la portée de tous est le premier devoir de toute société. »

 Albert Jacquard[3] 

 

 

 

 

Lire. La nuit. Le jour. A plat ventre devant un feu. Accroupi sur les dalles d’un trottoir les pieds dans le caniveau. Debout, dans une rame de métro. Allongé dans un lit d’hôpital. Assis, la nuit, à la table de la cuisine. Dans un train surpeuplé ou désert. Allongé sur la pelouse d’un parc à l’ombre d’un vieux chêne. Au sommet d’une montagne à peine gravie. Dans la salle de lecture aux sons feutrés d’une bibliothèque publique. Accroupi au fond d’un jardin entre deux groseilliers. La tête posée sur les cuisses de l’être aimé. A une terrasse de café frôlé par les passants pressés.  Sur un banc d’une allée d’ormes. Dans les senteurs de la mer  d’une plage surchauffée. Sur une barque dérivant au fil lent de l’eau verte d’un étang. Dans les dédales colorés d’une librairie sous l’œil bienfaisant, attentif et discret du bouquiniste. Porter le livre dans l’impatience de le lire. Sur les genoux, dans son sac, dans la main gauche tandis que la droite tient une poignée d’autobus. Sous le bras ou dans la poche s’il pleut.

 

 

 

 

Chiffonné, déchiré, en miettes, mais toujours lisible. Emprunté, annoté, gardant des traces de chocolat. Lire. Les yeux suivant les lignes ou entre elles. Des images naissent dans la tête, les personnages prennent forme, les actions éclatent dans l’imagination, le plus ancien écran de l’homme. Lire. Ne pas comprendre, relire, entendre une musique, relire pour la chanson, s’immerger, plonger, s’oublier dans une vie qui n’est pas la sienne et le devient un peu ou beaucoup, s’échapper, se mettre à côté, entrer dans des émotions inconnues, reconnaître des sentiments partagés, s’entourer d’un monde plus vaste que le monde, allonger le pas, danser sur place, errer dans des déserts, empiler des coquillages, écouter des voix, écouter les doigts frappant un clavier, vivre un rêve, attendre l’improbable, découvrir. Humer des  parfums à la seule lecture de leur nom, la seule description de leurs arômes, la seule allusion à leurs effets.

 

 

 

 

 

 

Trembler de froid ou mourir de chaud selon que l’auteur vous entraîne dans le grand nord, au Sahara ou au coin de votre jardin. Frissonner à la caresse d’un frôlement décrit en trois mots ou en trente. Pleurer à l’évocation d’un chagrin ou d’un désespoir. Cœur bondissant à l’apparition d’un bonheur. Espérer à la suggestion ou à la peinture vive d’un avenir. Lire ensemble, à voix haute, dans l’ombre d’un crépuscule rouge. Déchiffrer une calligraphie ancienne appliquée au dos d’une carte postale parlant de chance et de retour.

 

Le monde est une bibliothèque. La vie est un livre. Un livre est la vie. Ne pas lire est un racornissement. Empêcher de lire, une amputation. Priver de lecture c’est étouffer une galaxie. Barrer l’accès à la lecture, c’est condamner l’ouverture à la rêverie. On ne  peut vivre sans livres.

 

Gérard de Sélys

 

 

 

 

 

 

 

Livres et lectures

 

 

Chacune de nos lectures laisse une graine qui germe.  Jules Renard        

Le temps de lire, comme le temps d'aimer, dilate le temps de vivre.  Daniel Pennac                                                                

J'ai accompli de délicieux voyages, embarqué sur un mot.  Honoré de Balzac

Un bon livre est celui qu'on retrouve toujours plein après l'avoir vidé. Jacques Deval

 

Qui que vous soyez qui voulez cultiver, vivifier, édifier, attendrir, apaiser, mettez des livres partout. Victor Hugo                     

                                                     

                                   Qui veut se connaître, qu'il ouvre un livre.

                            Jean Paulhan

 

Je n'ai jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture n'ait dissipé. Montesquieu

Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux. Jules Renard
Une bibliothèque est une chambre d'amis. Tahar Ben Jelloun

 

Une pièce sans livres, c'est comme un corps sans âme. Cicéron

                                          

Un livre est une fenêtre par laquelle on s'évade. Julien Green

                                                                                      

Toutes les grandes lectures sont une date dans l'existence.  Alphonse de Lamartine

 

L'art de lire, c'est l'art de penser avec un peu d'aide. Emile Faguet

Lire, c'est boire et manger. L'esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas. Victor Hugo

 

J'aime à lire comme une poule boit, en relevant fréquemment la tête, pour faire couler. Jules Renard                                

 

A quoi servent les livres s'ils ne ramènent pas vers la vie, s'ils ne parviennent pas à nous y faire boire avec plus d'avidité ?  Henry Miller       

La lecture, une porte ouverte sur un monde enchanté.François Mauriac

                                                          

Chaque lecture est un acte de résistance. Une lecture bien menée sauve de tout, y compris de soi-même. Daniel Pennac          

                                                     

Il n'y a vraiment que deux choses qui puissent faire changer un être humain : un grand amour ou la lecture d'un grand livre. Paul Desalmand       

Une vie sans lecture est une vie que l'on ne quitte jamais, une vie entassée, étouffée de tout ce qu'elle retient. Christian Bobin 

                                                          

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.  Jean Guéhenno

 

 

 

 

 

 

Fondation d’utilité publique Lire Le Monde

Numéro d’entreprise : 0 823 642 143

165 rue Mazy, 5100 Namur, Belgique

             00 32 81 308 709 / +486 02 14  38

                fondationlirelemonde@gmail.com 

 

                   Contacts : Gérard de Sélys et Marie Anne Leszczynska   

 

 



[1] Le nouveau Petit Robert, Paris, 1993

[2] Le Robert, dictionnaire historique de la langue française, Paris, 2004

[3] Ecrire et faire écrire. De Boeck, Bruxelles, 2007

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8 juillet 2011 5 08 /07 /juillet /2011 17:14

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Chacune de nos lectures laisse une graine qui germe.  Jules Renard 

Le temps de lire, comme le temps d'aimer, dilate le temps de vivre.  Daniel Pennac             

 

J'ai accompli de délicieux voyages, embarqué sur un mot.  Honoré de Balzac

 

Un bon livre est celui qu'on retrouve toujours plein après l'avoir vidé. Jacques Deval 

 

Qui que vous soyez qui voulez cultiver, vivifier, édifier, attendrir, apaiser, mettez des livres partout.Victor Hugo             

            

Qui veut se connaître, qu'il ouvre un livre. Jean Paulhan

 

Je n'ai jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture n'ait dissipé. Montesquieu          

 

Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux. Jules Renard

                 

Une bibliothèque est une chambre d'amis.Tahar Ben Jelloun

 

Une pièce sans livres, c'est comme un corps sans âme. Cicéron 

Un livre est une fenêtre par laquelle on s'évade. Julien Green

           

Toutes les grandes lectures sont une date dans l'existence.  Alphonse de Lamartine

 

L'art de lire, c'est l'art de penser avec un peu d'aide. Emile Faguet

Lire, c'est boire et manger. L'esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas. Victor Hugo

 

J'aime à lire comme une poule boit, en relevant fréquemment la tête, pour faire couler. Jules Renard        

 

A quoi servent les livres s'ils ne ramènent pas vers la vie, s'ils ne parviennent pas à nous y faire boire avec plus d'avidité ?  Henry Miller

La lecture, une porte ouverte sur un monde enchanté. François Mauriac

                          

Chaque lecture est un acte de résistance. Une lecture bien menée sauve de tout, y compris de soi-même.

Daniel Pennac        

            

Il n'y a vraiment que deux choses qui puissent faire changer un être humain : un grand amour ou la lecture d'un grand livre. Paul Desalmand

Une vie sans lecture est une vie que l'on ne quitte jamais, une vie entassée, étouffée de tout ce qu'elle retient. Christian Bobin

                          

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.  Jean Guéhenno

 

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8 juillet 2011 5 08 /07 /juillet /2011 17:09

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Lire. La nuit. Le jour. A plat ventre devant un feu. Accroupi sur les dalles d’un trottoir les pieds dans le caniveau. Debout, dans une rame de métro. Allongé dans un lit d’hôpital. Assis, la nuit, à la table de la cuisine. Dans un train surpeuplé ou désert. Allongé sur la pelouse d’un parc à l’ombre d’un vieux chêne. Au sommet d’une montagne à peine gravie. Dans la salle de lecture aux sons feutrés d’une bibliothèque publique. Accroupi au fond d’un jardin entre deux groseilliers. La tête posée sur les cuisses de l’être aimé. A une terrasse de café frôlé par les passants pressés.  Sur un banc d’une allée d’ormes. Dans les senteurs de la mer  d’une plage surchauffée. Sur une barque dérivant au fil lent de l’eau verte d’un étang. Dans les dédales colorés d’une librairie sous l’œil bienfaisant, attentif et discret du bouquiniste. Porter le livre dans l’impatience de le lire. Sur les genoux, dans son sac, dans la main gauche tandis que la droite tient une poignée d’autobus. Sous le bras ou dans la poche s’il pleut.

 

 

 

 

Chiffonné, déchiré, en miettes, mais toujours lisible. Emprunté, annoté, gardant des traces de chocolat. Lire. Les yeux suivant les lignes ou entre elles. Des images naissent dans la tête, les personnages prennent forme, les actions éclatent dans l’imagination, le plus ancien écran de l’homme. Lire. Ne pas comprendre, relire, entendre une musique, relire pour la chanson, s’immerger, plonger, s’oublier dans une vie qui n’est pas la sienne et le devient un peu ou beaucoup, s’échapper, se mettre à côté, entrer dans des émotions inconnues, reconnaître des sentiments partagés, s’entourer d’un monde plus vaste que le monde, allonger le pas, danser sur place, errer dans des déserts, empiler des coquillages, écouter des voix, écouter les doigts frappant un clavier, vivre un rêve, attendre l’improbable, découvrir. Humer des  parfums à la seule lecture de leur nom, la seule description de leurs arômes, la seule allusion à leurs effets.

 

 

 

 

 

 

Trembler de froid ou mourir de chaud selon que l’auteur vous entraîne dans le grand nord, au Sahara ou au coin de votre jardin. Frissonner à la caresse d’un frôlement décrit en trois mots ou en trente. Pleurer à l’évocation d’un chagrin ou d’un désespoir. Cœur bondissant à l’apparition d’un bonheur. Espérer à la suggestion ou à la peinture vive d’un avenir. Lire ensemble, à voix haute, dans l’ombre d’un crépuscule rouge. Déchiffrer une calligraphie ancienne appliquée au dos d’une carte postale parlant de chance et de retour.

 

Le monde est une bibliothèque. La vie est un livre. Un livre est la vie. Ne pas lire est un racornissement. Empêcher de lire, une amputation. Priver de lecture c’est étouffer une galaxie. Priver de lecture, barrer l’accès à la lecture, c’est condamner l’ouverture à la rêverie.

 

Gérard de Sélys

 

 

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30 juin 2011 4 30 /06 /juin /2011 18:32

« Lire pour le plaisir s’est révélé être le moteur le plus important des futures chances d’un enfant. »

 

« Lire pour le plaisir a plus d’importance pour l’éducation d’un enfant que le statut socio-économique de sa famille.»

 

« Les recherches montrent avec évidence que la littérature a un rapport important avec le bonheur et le succès d’un individu.»[1]

 

1. Constats

 

Il y a des dizaines de foires et de salons du livre en Belgique chaque année. Mais personne ne s’occupe de ceux qui ne lisent pas, n’ont pas assez de moyens pour s’acheter des livres ou n’ont pas pris l’habitude de lire pour le plaisir, quelles qu’en soient les raisons, financières, culturelles, psychologiques, sociales ou éducatives.

 

On estime à au moins 10% de la population la part d’analphabètes et d’illettrés en Belgique. Cette proportion serait de 12% en France (Insee, 2002) et atteint même 22% au Québec. Une part beaucoup plus importante encore de la population a un accès difficile voire nul  à la pratique de la lecture (il n’existe pas d’étude sur la question si ce n’est, en France, les statistiques annuelles d’achat de livres montrant, par exemple, que la moitié des Français n’achète jamais de livres)[2].

 

En Belgique francophone, les manifestations publiques de promotion de la lecture ne sont entreprises que pendant deux mois par an (La fureur de lire, Je lis dans ma commune, la Foire du livre, Tournailapage, le Salon du livre politique de Liège, Le salon du livre alternatif de Bruxelles, etc). Il ne se passe rien pendant dix mois. A l’exception du travail remarquable des cent quatre vingt bibliothèques publiques qui, hélas, ne disposent que de moyens limités et dont personne ne met en valeur les initiatives locales souvent brillantes. Et à l’exception de l’action inlassable des libraires en faveur de la lecture qui, trop souvent, par manque de moyens, se limite à leur lectorat fidèle. Il ne se passe donc pratiquement rien pendant dix mois. Rien.

 

Il existe bien des réseaux d’alphabétisation (Lire et écrire, Ecoles Alpha) efficaces en Belgique francophone, mais ces réseaux n’ont pas les moyens de rendre les acquis pérennes de manière à éviter un retour à l’illettrisme de leurs usagers. Ces réseaux, que nous avons consultés, sont demandeurs d’actions de promotion d’accès à la lecture telles que nous le proposons.

 

2. Lire pour le plaisir

 

Il ne faut pas confondre lecture utilitaire et lecture plaisir. Lire l’intitulé d’un exercice de math, le règlement d’une école, sa feuille d’impôt, un procès verbal de contravention, ou même un article de journal n’est pas toujours très amusant. Lire pour le plaisir, c’est changer de monde et se changer soi, c’est se faire son propre cinéma, c’est choisir quand, à quel endroit et comment ouvrir un livre. Oui, un livre. Et si possible un roman. Une histoire fictive, qui n’existe pas, qui n’a jamais existé que dans la tête de celui ou celle qui l’a écrite et qui se met à exister dans la tête de ceux qui la lisent.

 

 

« Depuis l’invention de l’écriture, il y a quelque six mille ans, nous pouvons recevoir les idées émises il y a de nombreux siècles. Par l’écriture, les expériences individuelles sont délocalisées dans la durée, mises hors d’atteinte de l’oubli, à la disposition de ceux qui plus tard les liront. La pensée du lecteur peut côtoyer la pensée de l’auteur et en être enrichie ; le décalage du temps est annulé. Mettre cette performance, sans doute la plus décisive de celles que l’humanité s’est octroyée à elle-même, à la portée de tous est le premier devoir de toute société. » Albert Jacquard[3] 

 

3. Pourquoi lire pour le plaisir ?

 

A l’issue d’une longue enquête sur le terrain, le National Literacy Trust britannique constate dans un rapport récent que : « Lire pour le plaisir s’est révélé être le moteur le plus important des futures chances d’un enfant » que « lire pour le plaisir a plus d’importance pour l’éducation d’un enfant que le statut socio-économique de sa famille » et que « la littérature a un rapport important avec le bonheur et le succès d’un individu.»[4]

 

Des enquêtes menées aux Etats-Unis et en Suède montrent qu’une personne ayant une « culture générale » et une bonne pratique de lecture a infiniment plus de chances de trouver et de s’adapter à un nouvel emploi qu’une personne ayant une formation spécialisée et pas de pratique de lecture.

 

On sait que le jeu a un rôle déterminant dans le développement d’un enfant. Le jeu, c’est souvent le développement de l’imaginaire. L’imaginaire tient donc un rôle fondamental dans le processus de fabrication d’un futur adulte. Il semblerait que la lecture plaisir, la lecture évasion, le cinéma imaginaire qu’un enfant se fait en lisant soit tout aussi important. Pour son développement, pour ses facultés de bien être (bonheur ?) et pour l’équilibre de sa place dans la société. L’imaginaire reste essentiel ensuite pour les adolescents et les adultes (on appelle cela pour les adultes des rêves, rêves d’action rêves d’amour, « rêves d’évasion »).

 

Marie Bonnafé[5], qui mène et analyse des actions de lecture pour les bébés en France, constate que présenter des livres à des bébés, et les lire avec eux, est un facteur de développement émotionnel et intellectuel essentiel même « dans des familles écartées des rêveries poétiques par la dureté de la vie. » Pour elle, « les livres devraient être présents dans le quotidien de tous les petits enfants, sans aucune contrainte et sans recherche d’un quelconque bénéfice immédiat. Seul le plaisir pris par les tout petits et les adultes avec les premières histoires comme avec le comptines est à rechercher. » Même s’il y a des obstacles : « ouvrir le livre sur la vie se heurte à beaucoup de réticence, à beaucoup d’idées reçues : par exemple vouloir dispenser des formes de sous culture pour toucher les plus démunis, ou croire qu’il existe des carences culturelles irréversibles. »

 

La lecture plaisir est un acte de résistance. Résistance aux contingences sociales, professionnelles, psychologiques, affectives, climatiques, familiales, domestiques, grégaires, pathologiques, pécuniaires, idéologiques, culturelles ou nombrilaires. Une lecture plaisir sauve de tout, y compris de soi-même.[6]

 

4. Que faire ?

 

Pas de salons ou foires du livre. Pas d’actions (élitistes) limitées dans le temps, mais des actions tout au long de l’année. Exemple : ce que fait la fondation britannique Roald Dahl depuis 1984. Cette fondation créée par la veuve de l’écrivain Roald Dahl (Charlie et la chocolaterie) a lancé le Readathon[7]. Depuis 1984 et chaque année, après des mois de sensibilisation sur le terrain, dans les rues, sur les places publiques, dans les hôpitaux, les écoles et les bibliothèques, avec un soutien permanent des médias, une sorte de téléthon est organisé le soir de la journée mondiale du livre et du droit d’auteur, le 23 avril. Ce Readathon annuel a permis, depuis son lancement, de récolter l’équivalent d’un milliard quatre cent millions de francs belges (330 millions d’euros) qui ont été utilisés à aider ou créer des bibliothèques  (entre autres dans les hôpitaux pour enfants), et surtout à mener des actions de sensibilisation à la lecture plaisir tout au long de l’année dans les régions et les quartiers défavorisés. Résultat, chaque année 2% de ceux qui ne lisaient pas, enfants, adolescents et adultes, s’adonnent désormais à la lecture. On peut estimer ainsi qu’en vingt sept ans, près de la moitié des non-lisants britanniques se sont ainsi convertis au plaisir de lire. IMGP1035.petit.jpg

 

La fondation Lire Le Monde a le même but et se donnera les mêmes moyens que la fondation Dahl. Entre autre un Lirathon chaque année fin avril. Son action se développera dans un premier temps en Belgique francophone et sera étendue plus tard à d’autres pays francophones. Elle collecte déjà ce qui se fait comme « bonnes pratiques » à suivre, et liera plus encore les mondes des éditeurs, des libraires, des bibliothécaires et des lecteurs-conteurs. Elle lancera des campagnes de soutien à la lecture plaisir tout au long de l’année à la manière des campagnes de la Sécurité routière le long des routes et autoroutes. Elle développera et soutiendra les initiatives permanentes de promotion de la lecture.

 

Les contacts pris jusqu’ici montrent que l’activité prévue de la Fondation Lire Le Monde (secteur de l’alphabétisation, libraires, éditeurs, bibliothèques publiques, associations dites socio-culturelles -Article 27- CBAI-, Communauté française) répond à un véritable besoin et comble un vide réel.

 

Fondateur : Gérard de Sélys

 

 

 

Tout don est bienvenu.

 

IBAN : BE78 0682 4917 9586

 Fondation d’utilité publique Lire Le Monde
Numéro d’entreprise : 0 823 642 143
165 rue Mazy, 5100 Namur, Bellgique
téléphone : 00 32 81 308 709 / +486 02 14 38 

 

 



[1] http://www.literacytrust.org.uk/research/nlt_research/271_reading_for_pleasure_a_research_overview

[3] Ecrire et faire écrire. De Boeck, Bruxelles, 2007

[4] http://www.literacytrust.org.uk/research/nlt_research/271_reading_for_pleasure_a_research_overview

[5] Marie Bonnafé, Les livres, c’est bon pour les bébés, Hachette littératures, Paris 2001

[6] Daniel Pennac, Comme un roman, Folio 2724

[7] http://www.readathon.org/

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